vendredi 14 décembre 2007

2ème Chronique Poirier XL - Gazole


Voici le nouveau titre de Poirier XL, « Gazole » .


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L’orgue introduit, suivit de la guitare granuleuse et de la batterie ; une vraie batterie, et non plus la boîte à rythmes de « Guano » ; mais ils nous y avaient déjà habitué sur leur précédents singles. La voix, comme à leur habitude, est doublée : Xavier-Luc et Honoré chantant à l’unisson, tandis que Basile s’attèle aux chœurs.

"Gazole" est le genre de morceau dont l’atmosphère nous plonge nécessairement dans la méditation. C’est le genre de morceau dont une unique écoute ne nous rassasie pas, il faut le remettre, encore et encore, pour comprendre, pour en saisir véritablement, pleinement la beauté. On sent ici la cicatrice intérieure, la souffrance sourde ; pourtant ce n’est jamais geignard ; c’est d’un style, d’une élégance absolue. Comme le solo de saxophone à la fin de « Walk on the wild side », il pourrait durer une heure, mais il ne dure que quelques secondes, et on reste bouche bée. Comme dans « Playground Love » aussi.


Religion


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Le son est ici d’une douceur incroyable. Pas de basse. On sent vibrer l’air, résonner la ride, se réverbérer la guitare contre les murs froids d’un immense édifice construit pour adorer des dieux disparus. Car ce morceau est une messe. L’orgue sonne comme dans une cathédrale, nous préparant à l’Ave Maria, et les chœurs sont grégoriens, très clairement. Une mélodie simple, limpide, et qui rentre immédiatement dans notre tête. Simple et limpide, comme un chant de messe. Mais pas le genre de messe où est crié stupidement l’amour de Dieu, joyeusement, béatement, comme pour s’en convaincre, mais plutôt une messe où le chant est plein d’amertume, les yeux gonflés mais le regard fier, c’est l’espoir qui parle. C’est comme un dimanche ensoleillé, un dernier jour de vacances d’été : tout est fini, rien ne s’est passé comme on l’aurait souhaité, tout n’est que déception, désillusion… mais on va pas s’arrêter là alors on relève la tête, on serre les dents, et on serre les poings aussi.

Cette chanson résonne comme une catharsis. On pourrait peut-être rapprocher le sentiment ressentit à ceux procurer par certaines chansons de Belle & Sebastian, ou de Nick Drake ou du Miles Davis d’ « Ascenseur pour l’Echafaud ».Dans cette tristesse, cette lassitude, et la beauté lumineuse qui la transperce. (Une seule chanson prise comme objet d’étude nécessite forcément, à mon avis, la comparaison à d’autres, pour en en exprimer l’ambiance, pour en retranscrire la couleur ; ceci explique l’étalage de noms que je fais).


Mélancolie



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L’arrivée de la batterie est similaire à celle de « Riot Van » des Arctic Monkeys, progressive, finement amenée, subtile, classieuse. Et puis quand le refrain démarre, décolle, çà prend aux tripes, çà t’arrache à ton siége et ça te cloue en même temps, c’est puissant, mais pas dans le sens vulgaire : c’est puissant sans force, sans violence. Enfin si, c’est violent. Violent comme peut l’être la soul, le corps droit, tendu, sans rien qui dépasse. D’ailleurs ce morceau me fait penser au groupe de Sheffield, sans trop que je sache pourquoi. Peut-être dans cette espèce de mélancolie cachée derrière la fierté, ou peut-être juste à cause de l’orgue de « 505 ».

Mais cette chanson « contient tout un rêve », le souvenir d’un ailleurs disparu, de rencontres qui n’ont jamais eues lieux, d’amis partis, de lieux merveilleux comme on en voit qu’en rêve. Cette chanson incarne à elle seule le spleen de Baudelaire. Le couplet tente bien par moments de simuler la joie, mais on n’y croit pas à un seul instant, et puis c’est pour redescendre encore plus bas. C’est comme les très bonnes chansons de Barbara ou d’Aznavour, en plus glacé peut-être, en plus distordue en tout cas.

Mais le plus important dans « Gazole » c’est que c’est un étalon, un idéal-type, c’est la matrice d’un renouveau esthétique. On sent les influences, on sait d’où ça vient, mais ce qui compte c’est que ça transporte putain, c’est que lorsqu’on écoute cette chanson , on est obligé d’être attentif car on pré-sent quelque chose de grand, de fondateur, de primordial, de fondamental. Car avec cette chanson « je mange des souvenirs » dirait Baudelaire. J’aurais pu dire que c’était séminal, mais c’eut été moins joli.



Arnaud.


www.myspace.com/poirierxl

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